Le travail d’Antide explore la frontière fragile entre la dégradation et la sublimation
Bois rongé par le temps, métal rouillé, pierres oubliées : ces fragments portent la mémoire de leur usure. Mais dans l’atelier, un processus alchimique s’opère. À travers l’oxydation des métaux – provoquée par des bains d’acides savamment maîtrisés – les surfaces se couvrent de nuances inattendues.
Du vert turquoise au brun profond, ces couleurs ne sont pas peintes, mais révélées par la chimie même de la matière, comme si le métal livrait sa vérité secrète.
Ce geste rejoint une longue tradition artistique. Dès l’Antiquité, les artisans admiraient la patine du bronze et la noblesse des métaux vieillis. Plus récemment, des artistes comme Anselm Kiefer ont utilisé le plomb oxydé et brûlé pour évoquer le passage du temps et la mémoire collective. D’autres, comme Richard Serra avec ses sculptures monumentales en acier Corten, ont fait de la rouille une partie intégrante de l’œuvre, célébrant l’action du temps au lieu de la combattre. Chez Antide, l’or intervient comme une réponse à cette transformation.
L’oxydation exprime la fragilité, l’altération, l’éphémère. L’or, au contraire, vient suspendre ce processus, apporter une lumière intemporelle, presque sacrée. La juxtaposition des deux crée une tension poétique : d’un côté la chimie brute, de l’autre la symbolique éternelle. En assemblant métal, pierre et bois, Antide compose des œuvres qui semblent figer le temps tout en racontant son passage.
C’est une chimie poétique : là où la science produit une oxydation, l’art en tire un langage visuel et symbolique. Ce n’est pas un geste de simple conservation, mais un geste de transfiguration.



